Les coupures d’électricité posent d’énormes problèmes à certains couturiers
Il va faire 2h, que Innocent cherche à convaincre son client, afin que ce dernier lui accorde encore un jour ; question d’achever la couture de son boubou. Mais, les négociations entre les deux parties sont loin d’aboutir à une solution cohérente. Car, celui-ci ne veut rien comprendre. « Chaque jour, reviens demain. Je veux mon habit. C’est seulement sur mon vêtement que le problème de baisse tension commence. J’en ai marre de tes faux rendez-vous», lâche le client. Le couturier est dos au mur. Il cherche des petits mots pour baisser la tension. « S’il te plait ! Ce n’est pas de ma faute. C’est depuis deux semaines que je n’arrive pas à travailler normalement. Quand ce n’est pas le courant qu’on a coupé, c’est la baisse de tension. Comprenez moi aussi», argumente le couturier installé au quartier Ekounou.
Au marché Mokolo, plus précisément aux lieux dits Hangar1 et 2, certains couturiers crient à l’aide. Les machines à coudre tournent au ralenti depuis pratiquement trois semaines. « Il n’est pas possible de travailler normalement. On travaille sous pression. Il faut sortir tôt pour travailler vite. Parce que à une certaine heure, on coupe le courant », explique Mohamed, couturier de la place. Sa collègue d’à côté est sans voix. Elle a opté faire du jus de fruits et la vente de fruits pour arrondir ses journées. « Moi je vends le jus de foléré, les gâteaux et les pommes. C’est ce qui m’épaule un peu. Ma machine fonctionne avec l’énergie électrique. Tous ces derniers temps, je ne prends plus les habits pour éviter les problèmes », confie Marylise, couturière et mère de trois (3) enfants.
En réalité, certains couturiers, résidant dans la ville de Yaoundé, ont du mal à joindre les deux bouts depuis plusieurs semaines, à cause des coupures régulières d’électricité. Au-delà de ce problème finalement permanent, ce désagrément est à l’origine des éclats de voix entre couturiers et clients. Conduisant, très souvent, à des scènes de bagarre. Face à cette situation, d’autres se trouvent obligés de se rabattre sur d’autres secteurs d’activités pour maintenir leurs familles.
Moulin à écraser : les machines ronflent à peine
C’est à la limite insupportable pour certains ménages dans la ville de Yaoundé. Il n’est plus possible de tourner le couscous de maïs. « C’est depuis 11h que j’attends écraser mon maïs. Le jeune homme me dit qu’il n’y a pas le courant. Je suis obligée d’attendre », explique une dame. Pour les meuniers, ils n’ont pas le choix. Certains utilisent les groupes électrogènes pour régler des pareilles situations. « Le groupe électrogène est la seule solution à mon sens. Ça permet de nous éviter certains problèmes. On a notre groupe. Dès qu’on coupe, on démarre le groupe », propose le jeune homme.
Dans les quartiers, certaines femmes qui se font de l’argent grâce aux moulins à écraser, ne voient plus claire. « J’écrase les condiments. C’est cet argent qui me permet de payer certaines factures et donner l’argent de poche aux enfants pour l’école. Quand le courant perturbe, ça m’inquiète tellement », déplore la mère de sept enfants.
Secrétariat : des bureaux hors service
La situation se complique. Certains secrétariats, dans la ville de Yaoundé gardent leurs portes fermés depuis pratiquement trois (03) semaines. Dans les quartiers comme Mvan, Nsam et autres, la situation est plus que chronique. Au secrétariat « l’ami des étudiants », par exemple, les locataires de cet espace transforment progressivement les lieux en une boutique. On y vend désormais de tous. « Je n’ai pas le choix mon frère. Je vais faire comment ? On coupe le courant presque tout le temps. On ne sait plus qu’elle activité menée. Ce que je fais actuellement, je vends tous ce qui passe. Sinon, je ne vais pas m’en sortir avec cette allure ci », déplore Ferdinand, propriétaire dudit secrétariat. En effet, ce jeune père de quatre (4) enfants offre divers services aux étudiants et autres citoyens. Photocopies, saisis, impressions, scan entre autres services rendus aux camerounais.
Il n’est pas le seul. Certains font déjà dans la restauration pour joindre les deux bouts. « J’ai transformé mon secrétariat en un restaurant. Je ne suis plus dans le travail qui nécessite forcement l’énergie électrique. J’ai déjà trop vu. Je n’en peux plus », avoue un jeune homme. Mais, il compte renouer avec son activité si jamais, la situation se rétablit. Chaque jour suffit sa peine. Hélène n’en peut plus de ses peines. Elle est payée en fonction de ce qu’elle gagne comme revenus dans la caisse. « On me paye en fonction de ce que je gagne. On coupe le courant tout le temps. Non seulement cela me handicape, mais aussi mon patron. Je me sens obligée de laisser si la situation ne se règle pas d’ici la fin de ce mois », espère –t-elle.
Il faut comprendre que, dans une note du porte-parole du gouvernement, datant d’une semaine, le ministre de la communication annonçait des mesures fortes de l’Etat dans le cadre de l’amélioration et la stabilisation dans le secteur de l’électricité au Cameroun. René Emmanuel Sadi indiquait que les populations devraient croire à un retour à la normale d’ici la fin du mois de mars. Mais, à côté de cela, l’on regrette quand même, les nombreuses conséquences que ces coupures engendrent dans certains secteurs d’activités. Surtout, dans l’informel où, ce sont des jeunes qui y exercent pour nourrir leurs petites familles et subvenir à leurs besoins financiers.