Au cours de la conférence scientifique internationale, qui s’est ouverte le 6 juin 2023 à Yaoundé, sur le thème « approche pratique d’adaptation de la culture du cacaoyer et caféier aux changements climatiques », le Cameroun a présenté et partagé avec la communauté des producteurs et scientifiques venus de différents pays, les résultats des recherches conduites depuis 2013, à l’effet de s’adapter aux effets des changements climatiques qui menacent la culture du cacao et du café.
À titre d’illustration, selon la Société de développement du cacao (Sodecao), le Cameroun perd 40 à 50% jeunes plants de cacaoyers par an en raison des changements climatiques. Confiés par le Conseil interprofessionnel du cacao et du café (CICC) au Cabinet d’expertise en recherche et conseils agricoles (Cerca), les travaux de recherche, qui ont débouché sur l’offre camerounaise à l’économie cacaoyère et caféière mondiale, ont privilégié l’observation de la plante tout au long des saisons. Cette observation a permis de déceler à chaque période de l’année et en fonction des bassins de production, des anomalies survenues sur la plante du fait des effets des changements climatiques, de proposer des traitements dédiés, ainsi que des pratiques à éviter par les producteurs.
Par exemple, peut-on lire dans le guide produit au terme des différentes recherches, pendant la période post-récolte, qui se situe entre les mois de janvier et mars, selon les bassins de production, les changements climatiques se traduisent sur le cacaoyer par des cabosses momifiées, le dépérissement des plants et le vieillissement des feuilles. Pour faire face à ces phénomènes, conseille le guide, « il faut couper toutes les cabosses momifiées et les mettre dans une fosse hors du champ, éliminer les gourmands et toutes les branches pendantes portant de vieilles feuilles à l’aide d’une manchette bien tranchante, et veiller à avoir un nombre d’arbres autre que le cacaoyer suffisant pour atteindre 40% de lumière et 60% d’ombrage ». Mais surtout, « ne pas laisser les cabosses momifiées trainer dans le champ », apprend-on. Cette méthodologie est appliquée à toutes les étapes du cycle de production du cacao, des cafés robusta et arabica.
« Observer et agir »
Baptisée « observer et agir », cette approche est actuellement implémentée, à titre expérimental, dans une vingtaine de plantations de cacao et de café au Cameroun, révèle le Dr Joseph Mouen Bedimo, promoteur du Cerca. Selon le CICC, l’approche camerounaise présente l’avantage de pouvoir être implémentée par tous, particulièrement par les petits producteurs, qui représentent la plus grande proportion des producteurs de cacao et de café. Mieux, la démarche camerounaise tranche avec les trois pistes constamment proposées par la communauté scientifique internationale depuis des années.
Il s’agit notamment de la mise au point de nouvelles variétés de cacaoyers et caféiers résilientes aux variations climatiques, l’irrigation des plantations de cacaoyers et de caféiers, et la pratique de l’agroforesterie. Autant de suggestions des scientifiques jugées soit très onéreuses, soit efficaces sur le long terme, et donc inopérantes dans l’immédiat pour les petits producteurs, dont les seuls revenus proviennent parfois de la culture du cacao ou du café.
S’exprimant ce 6 juin 2023 à l’ouverture de la conférence scientifique qui s’achève le 8 juin prochain, le ministre camerounais de l’Agriculture, Gabriel Mbairobe, a émis le vœu que cette approche d’adaptation aux changements climatiques dans les filières cacao et café soit rapidement déployée dans l’ensemble des bassins de production du pays, dupliquée dans d’autres pays producteurs, et étendue à d’autres spéculations. Car, a-t-il fait remarquer, le cacao et le café ne sont pas les seules victimes de ce phénomène qui, selon lui, « perturbe l’économie mondiale et impacte des vies ».