Le boycott par les États-Unis du prochain sommet du G20 à Johannesburg suscite de vives inquiétudes et critiques en Afrique. Selon Djibril Gningue, analyste sénégalais, la décision de Washington, qui refuse d’envoyer tout représentant, n’est pas liée aux allégations sud-africaines contestées, mais repose sur des calculs stratégiques visant à entraver la montée d’un monde multipolaire et constitue une atteinte directe à la dignité et à la souveraineté du continent africain.
I. Contexte : Un boycott lourd de sens politique
Le sommet du G20, prévu à Johannesburg les 22 et 23 novembre 2025, devait marquer une première historique en se tenant sur le sol africain. Cette étape est cependant éclipsée par la décision radicale du président américain Donald Trump, qui a non seulement demandé l’exclusion de l’Afrique du Sud du G20, mais a également confirmé le 7 novembre qu’aucun représentant américain ne participerait à l’événement.
Cette décision fait suite à une escalade de tensions entre les deux pays, notamment après l’imposition de droits de douane de 30 % sur l’Afrique du Sud par Washington plus tôt cette année.
II. Le Boycott : Une réponse au défi posé par les BRICS
S’exprimant depuis Dakar, Djibril Gningue, du Groupe de recherche et de Dappio – Conseil (GRADEC), affirme que le motif officiel avancé par Washington – les allégations non fondées de « génocide des fermiers blancs » – n’est qu’un prétexte. L’analyste y voit plutôt une réponse à la montée en puissance d’alternatives géopolitiques, notamment les BRICS.
> « Trump est aujourd’hui directement menacé par les BRICS, c’est-à-dire la Chine, la Russie, l’Inde, l’Afrique du Sud et le Brésil. D’autant plus que les BRICS représentent désormais environ 33 % du PIB mondial, dépassant largement le G7. Cela constitue donc une menace réelle, » a commenté M. Gningue.
Selon lui, cette pression américaine sur les pays du Sud est une réaction au « vent » de souveraineté qui souffle sur le monde, et particulièrement sur l’Afrique, et vise à freiner l’émergence d’un monde multipolaire jugé inévitable et souhaitable.
III. Une atteinte à la souveraineté et à la dignité africaine
L’analyste a également lié la position américaine à la plainte déposée par l’Afrique du Sud devant la CPI contre Israël pour crimes de guerre à Gaza. Pour M. Gningue, la plainte sud-africaine était justifiée face à l’extermination de milliers de Palestiniens, et toute tentative d’utiliser cette affaire comme justification du boycott est motivée par l’intérêt personnel de Washington.
Alors que l’Afrique du Sud doit céder la présidence du G20 aux États-Unis pour 2026, l’analyste sénégalais a qualifié la posture américaine d’attaque contre l’ensemble du continent.
> « L’Amérique ne cherche pas à empêcher l’Afrique de porter atteinte à sa souveraineté. C’est tout le contraire. C’est l’Afrique qui a toutes les raisons de dissuader les États-Unis de violer sa souveraineté, » a-t-il déclaré, dénonçant une initiative qui « porte atteinte à la dignité et à l’honneur de l’Afrique tout entière ».
Pour répondre à cette pression et affirmer son poids sur la scène mondiale, Djibril Gningue a exhorté les nations africaines à renforcer leur unité et leur cohésion, notamment en agissant de concert sur des questions concrètes, telles que l’obtention d’une représentation permanente au Conseil de sécurité de l’ONU.