De nombreuses personnes ont pensé que la décision du gouvernement Camerounais relevait d’un saut de tête, face aux grévistes. Que non, il s’agit d’une décision savamment murie et prise consécutivement à un examen réel de la situation économique du pays.
La dette de l’Etat aux enseignants
Pour l’année 2022, la loi de finances prévoit un crédit de 31 milliards FCFA à mettre à la disposition du ministère des Enseignements secondaires au titre de l’apurement d’une partie de la dette due aux enseignants. C’est l’une des informations données au cours de la réunion tenue à Yaoundé le 4 janvier dernier par le comité interministériel ad hoc mis sur pied pour examiner les difficultés rencontrées par ce corps de métier, relativement à leurs actes de carrière et leur prise en charge. Dans le compte rendu de cette réunion, il est indiqué que le ministère des Finances (Minfi), chargé de mobiliser cette enveloppe, conteste néanmoins ce chiffre. Pour le Minfi, la dette de l’État envers les enseignants s’élève plutôt à 121 milliards FCFA. Mais pour le Minesec, il s’agit bien de 181 milliards FCFA dus au 4 novembre 2021. Montant soutenu par le Bureau exécutif national du Collectif des enseignants indignés du Cameroun (Ben-Ceic).
Pour cet organisme syndical, la cagnotte de 31 milliards FCFA destinés aux rappels issus de la loi de finances 2022 est « très insignifiante ». Cette divergence sur les chiffres ne s’arrête pas là. En effet, dans un bilan dressé le 10 décembre dernier, le Ben-Ceic rappelle que 158 000 dossiers sont en instance dans les chapitres des intégrations (21 000), des avancements 98 000) et des autres actes de carrières (39 000), pour un montant cumulé de 152 milliards FCFA.
Dans une lettre du Secrétaire général des services du Premier ministre convoquant la réunion du 4 janvier, il est plutôt question de 148 704 dossiers en instance de paiement au Minesec. Quoi qu’il en soit, le Minesec a informé les parties à la réunion du 4 janvier que plus de 41 000 dossiers d’avancement d’échelon et 2 401 avancements de grade ont été traités. Il a aussi été décidé, au terme de cette rencontre, que le Minfi devait revoir à la hausse l’enveloppe arrêtée cette année pour régler la dette due aux enseignants, que ladite enveloppe soit stabilisée et qu’un calendrier de planification de paiements des rappels soit produit. Il ne s’agit là que d’une infime partie de la dette interne du Cameroun.
Selon l’avant-projet de loi de finances présenté le 8 août 2021 lors du conseil de cabinet, le Cameroun devrait payer sur la dette publique des intérêts envisagés à 239,6 milliards de Fcfa. Cette enveloppe budgétaire serait en hausse de 49,4 milliards de Fcfa (25,97%), par rapport à celle de 2021, ou elle était à 190,2 milliards. Cette hausse se justifie par « la reprise du paiement en 2022 du service de la dette extérieure, allégé en 2020 et 2021 dans le cadre de l’initiative de suspension du service de la dette extérieure du G20 (ISSD) », a expliqué le ministre des Finances Louis Paul Motaze, lorsqu’il présentait l’avant-projet de loi de finances 2022 en conseil de cabinet. Avec la survenue de la pandémie à Coronavirus, en 2020, l’initiative du G20 (groupe des 20 pays les plus industrialisés du monde), avait mis en place l’initiative de suspension du service de la dette extérieure (ISSD), pour aider les pays pauvres à concentrer leurs ressources sur la lutte contre la pandémie du Coronavirus.
Rendu actuellement dans sa troisième phase, l’ISSD a permis au Cameroun de bénéficier, sur les neuf premiers mois de l’année en cours, de la suspension du remboursement d’une dette globale de 115,3 milliards, selon la Caisse autonome d’amortissement (CAA). Notons par ailleurs que selon la CAA, à fin septembre 2021, le service de la dette réglé par l’administration centrale depuis le début de l’année courante est évalué à 835,9 milliards de FCFA, dont 79,4% destiné au remboursement du principal et 20,6% pour le paiement des intérêts et commissions.
En termes de composition, ce service cumulé a été réglé à hauteur de 82,9% en faveur des créanciers extérieurs et 17,1% au profit des créanciers intérieurs. Rappelons qu’en 2022, le Cameroun ne compte plus solliciter l’initiative ISSD. En gros, il y a des signes qui ne trompent pas, le Cameroun traverse une mauvaise passe économique. Inutile de continuer de cumuler des postes de dépenses qui pourront à la longue continueront de couter cher à l’Etat.