L’accident survenu le dimanche 27 décembre 2020 à Ndikiniméki est un énième drame. Un drame qui s’accroit au fil de temps avec un Président de la République absent, distant et silencieux qui n’arpente jamais les routes de son pays pour se rendre compte par lui-même de la réalité dans laquelle évoluent les populations. Des ministres dont la majorité ne se préoccupent pas des populations ni des résultats. Obsédés qu’ils sont à durer au Gouvernement par divers investissements dans les démarches politiciennes et à accumuler autant d’argent que possible.
Cet accident emporte plusieurs dizaines de compatriotes de façon tragique. Il s’inscrit dans une longue suite d’accidents qui nous sommes désormais familiers. Tous nous devons marquer un temps d’arrêt pour témoigner notre compassion à l’égard des familles des victimes et exprimer autant que possible notre solidarité.
Nous nous joignons à tous ceux et celles qui ont exprimé leur douleur et leur solidarité à l’endroit des rescapés et des proches des personnes décédées.
Quand des catastrophes pareilles surviennent, il est légitime d’être choqué, en colère et triste du fait des différentes pertes qui en découlent. C’est humain, compréhensible et nécessaire. Nous sommes tous de potentielles victimes d’accidents de la route ! Il nous faut aussi apprendre à aller au-delà. Il y a le temps de la désolation. Celui – ci doit laisser place, le moment venu, au temps de la réflexion et puis de l’action. Le pays ne progresse que lorsque nous tirons collectivement les enseignements des épisodes douloureux qui nous frappent de manière à en réduire l’occurrence pour l’avenir.
Au moment de réfléchir, nous devons nous poser les questions suivantes :
▶ Quelles sont les causes de ces accidents ?
▶️ Quels sont les facteurs qui les favorisent?
▶️ Quels sont les mesures qui peuvent être prises individuellement et collectivement pour réduire l’occurrence de tels drames?
▶️ Qu’est – ce qui explique que ces mesures ne soient pas encore prises ?
▶️ Qui sont les responsables directs et indirects de cette situation ?
▶️ Que pouvons – nous faire dès à présent pour nous prémunir des erreurs du passé à un niveau individuel et collectif ?
Pour ce qui nous concerne, il y a des éléments constants qui reviennent chaque fois que nous avons ces accidents. Il s’agit :
• Des défaillances et des erreurs commises par des conducteurs qui ne travaillent pas toujours dans les conditions optimales.
• Des agences de voyage qui sont loin de respecter les normes en matière d’entretien de véhicules, de nombre de passagers et de contrôle des conducteurs.
• Des routes qui ne sont pas de bonne qualité (Etroitesse, nids de poules, etc) et qui ne font pas l’objet d’une bonne signalisation.
• Des défaillances très importantes dans la régulation de la part des pouvoirs publics qui n’arrivent pas à imposer le respect des normes diverses aux agences de transport et à les sanctionner efficacement.
Ces éléments cités plus haut ne sont pas exhaustifs mais font partie des problématiques à traiter en vue de réduire au maximum les accidents qui surviennent sur nos routes.
Dans cette optique, nous restons persuadés que les orientations suivantes sont incontournables dans la perspective de réduire les accidents sur les routes :
✔ Une meilleure régulation de la part des pouvoirs publics. Ceci signifie de mettre à jour les normes et les communiquer régulièrement aux acteurs du secteur des transports, délivrer des autorisations de fonctionnement conditionnées uniquement au respect de ces normes, surveiller sur le terrain le respect de ces normes et sanctionner fermement celles des entreprises qui ne le font pas.
✔Un meilleur fonctionnement des agences de transport public. Tous les facteurs à risque liés à l’état des véhicules, au comportement de leurs personnels, à la surcharge et aux cadences aussi bien des véhicules que des conducteurs doivent être examinés de prêt. La course au gain maximal et l’insouciance ne peuvent pas être les principes directeurs du fonctionnement du secteur des transports au Cameroun.
✔Une meilleure intégration des usagers et des associations spécialisées dans la veille et le contrôle des agences de voyage. Nous avons besoin d’élargir aux usagers et aux associations spécialiser le travail d’observation et de dénonciation des dérives et fonctionnements à risques pouvant survenir dans les agences de voyage. Pour y arriver, des plateformes de dénonciation doivent être vulgarisées avec des canevas qui permettent de décrire de manière précise les dysfonctionnements observés. Les associations spécialisées doivent être subventionnées par les pouvoirs publics pour faire un travail d’enquête. Les services de l’État en charge des transports doivent pouvoir faire des contrôles réguliers, systématiques et inopinés dans ces agences. Un cadre mensuel ou bimensuel peut être crée pour examiner à l’échelle locale comme nationale l’évolution du respect des normes par les différentes agences de transport.
✔De meilleures routes et dispositifs de signalisation sur ces dernières. Le facteur humain est certes décisif dans les accidents. Mais il se couple au facteur infrastructurel qui doit être amélioré. De bonnes routes sont dans cette optique indispensable !
Il n’est pas compréhensible ni admissible que nous puissions avoir de grands axes routiers avec d’énormes nids poules qui augmentent les risques d’accident. Un service d’entretien plus rapide dans les interventions est donc nécessaire. Ainsi que des investissements importants pour doter notre pays des infrastructures routières à la hauteur.
Bien évidemment, tout ceci est difficilement possible si les paramètres de la gouvernance publics restent inchangés. A savoir :
Un Président de la République absent, distant et silencieux qui n’arpente jamais les routes de son pays pour se rendre compte par lui même de la réalité dans laquelle évoluent les populations. Des ministres dont la majorité ne se préoccupent pas des populations ni des résultats. Obsédés qu’ils sont à durer au Gouvernement par divers investissements dans les démarches politiciennes et à accumuler autant d’argent que possible.
Un pouvoir législatif incapable de contrôler effectivement l’action du Gouvernement, de mener des enquêtes parlementaires et d’imposer au Gouvernement une quelconque inflexion de sa politique.
Une justice dont on ne voit jamais des initiatives sur des questions d’intérêt général qui reste totalement assujettie au pouvoir exécutif actuel.
Des usagers et des associations spécialisées qui sont impuissantes car faiblement organisées pour contrôler l’action du Gouvernement et mener des mobilisations efficaces en vue d’imposer des changements conformes à l’intérêt général.
Nous nous retrouvons donc à la fameuse question inévitable : peut – on espérer des changements structurels, significatifs et durables des politiques publiques sans un changement préalable des gouvernants et du système de gouvernance en place ? Évidemment non !
La qualité des politiques publiques dépend de la qualité des pouvoirs.
La qualité des pouvoirs dépend de la qualité des contre-pouvoirs.
Si nous voulons que les choses s’améliorent, nous devons améliorer la façon dont nous exigeons le respect de nos droits et de nos intérêts en tant que citoyens.
Si nous voulons que les choses changent, nous devons agir pour que les choses changent !