Les craintes d’un embrasement national, souvent prophétisées dans l’ombre des joutes électorales, ne se sont pas concrétisées. Plus de deux semaines après la prestation de serment issue de l’élection présidentielle du 12 octobre dernier, le Cameroun respire. L’accalmie observée n’est pas un simple fait du hasard, mais le résultat d’une action concertée où l’engagement citoyen a joué un rôle déterminant. Au cœur de cette réussite se trouve l’initiative « Give Peace a Chance » (GPaC).
Une Diplomatie de la Modération Contre le Chaos
Rencontré par notre rédaction, Roger Robert Ngangue, Coordonnateur Général de la campagne GPaC pour la promotion de la paix et de la non-violence, se montre optimiste. Pour lui, le scénario catastrophe a été évité grâce à l’orientation profonde des Camerounais vers la paix.
> « La majorité des Camerounais est orientée vers la paix. Elle estime que la paix est essentielle, ce n’est pas dans le chaos qu’il faut se faire entendre raison. Les compatriotes ont besoin de mener leur train quotidien, d’accompagner leurs enfants à l’école, de faire leurs petits commerces et de subvenir aux besoins de leurs familles. »
L’approche de GPaC a consisté à transformer la colère, que M. Ngangue décrit avec ses « quatre filles » (explosion incontrôlée, résignation, lamentations, retenue/modération), en une « diplomatie de la modération ». Pendant deux mois, la campagne a mené un travail de fond, combinant causeries, sensibilisation, et dialogue, cherchant à s’attaquer aux racines de la colère plutôt qu’à ses seules manifestations violentes.
Un Sondage National pour Libérer la Parole Citoyenne
Dans la continuité de cette action d’apaisement, GPaC lance un sondage national d’opinion ambitieux, dont l’objectif est de consolider l’accalmie en écoutant les citoyens.
> « Dans un tel contexte, le sondage a toute sa raison d’être. Il permet de retourner la parole à ses compatriotes, à tous les citoyens qui ont manifesté leur colère, afin de connaître les ressorts et les racines de cette colère de manière à ce que cela soit pris en compte pour les échéances futures et que ceux qui gouvernent le pays puissent orienter leurs actions publiques à la résolution de ces contentieux et de ces différends », renchérit Roger Robert Ngangue.
Ce sondage n’est pas une simple enquête. Il vise à identifier les colères, déceptions, craintes, frustrations et espoirs des citoyens (Objectif Général : Évaluer l’état d’esprit de la population face au contexte socio-politique). Les résultats serviront à orienter des dialogues concrets, des actions de médiation, et à rédiger un mémorandum à l’attention des décideurs. Le champ d’application est vaste, couvrant 58 départements du Cameroun et la diaspora, avec un objectif de 10 millions de consultations en ligne.
Recoudre le Tissu Social par l’Art : Le Concours « Exprime la Non-Violence
Pour amplifier cet élan de dialogue inclusif et non partisan, le projet GPaC a également lancé un Concours National – « Exprime la Non-Violence ».
> « Il s’agit pour nous après avoir observé la déchirure du tissu social pendant ses joutes électorales… d’essayer à travers l’art qui est le meilleur véhicule de la réconciliation, du vivre ensemble et de la cohésion de recoudre ce tissu social, de recoudre la toile de notre appartenance commune à une nation malgré nos différences, malgré nos dérives, malgré nos colères ».
Le concours encourage les expressions artistiques (chant, poème, graffiti, peinture/œuvre d’art avec des matériaux locaux) autour des thèmes de la Paix, de la Non-Violence, de la Réconciliation nationale et du Dialogue. Ouvert jusqu’au 20 novembre à minuit, il offre des primes substantielles aux lauréats dans chaque catégorie (150 000 FCFA pour le premier, 100 000 FCFA pour le second).
La Paix, un Construit Citoyen Durable
Alors que la campagne nationale approche de sa clôture, un constat s’impose : la paix au Cameroun n’est pas un slogan passif, mais un construit citoyen actif. L’heure n’est plus à l’évitement des problèmes, mais à la résolution durable du tissu social et à la nécessité de réapprendre à marcher ensemble. L’initiative Give Peace a Chance illustre comment l’engagement de la société civile peut être le ciment de la stabilité nationale face aux turbulences politiques.