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Edito : contre-vérité sur Le Pen

La question de la Guerre d’Algérie continue de susciter en France le besoin d’en parler mais sans aller à l’essentiel : demander pardon, comme l’ont fait d’autres pays qui, se trouvant redevables au regard de leur passé colonial, ont fait acte de repentance et ont demandé pardon, par exemple la Belgique et l’Allemagne (nous y reviendrons). La France persiste encore et toujours dans le déni de l’histoire de son passé colonial, un passé colonial qui aurait dû être soldé il y a plus de 60 ans.

Il se trouve qu’il est devenu à mesure que le temps passe une inépuisable et substantielle rente mémorielle qui se lègue de génération en génération d’hommes politiques. Dans un podcast que vient de mettre en ligne la radio publique France Inter, produit par Philippe Collin et intitulé «Jean-Marie Le Pen, l’obsession nationale», on y entend cette monstruosité : «Jean-Marie Le Pen n’a sans doute pas pratiqué la torture en Algérie.» Ces propos ne sont pas sortis de la bouche d’un tortionnaire qui, à la fin de sa vie, nie encore sa participation active dans les crimes commis pendant la guerre d’Algérie. Ce ne sont pas non plus des affirmations à l’emporte-pièce d’un historien en herbe.

Cette péremptoire allégation, cette contre-vérité historique vient de l’auguste historien dont l’intégrité intellectuelle devrait être irréprochable : Benjamin Stora. Oui, vous avez bien lu, Benjamin Stora qui suscite là une incompréhension totale de la part de quelqu’un qui est censé connaître les moindres recoins de l’histoire de la guerre d’Algérie à laquelle a participé Jean-Marie Le Pen dans un rôle non pas d’enfant de chœur, mais de tortionnaire assoiffé de sang de ses nombreuses victimes. Les propos de Benjamin Stora ont choqué de nombreux historiens, parmi lesquels André Loez et Fabrice Riceputi, qui se sont exprimés sur les réseaux sociaux.

Est-ce juste le fruit d’un moment d’inattention ou une provocation, ou pire encore, l’attestation d’un travail de Benjamin Stora fait à destination de l’histoire ? Pour Florence Beaugé, journaliste au journal Le Monde qui a consacré de nombreuses années sur la torture en Algérie, c’est «un comble». «Le Pen se retrouve blanchi de l’accusation à deux reprises. D’une part par Benjamin Stora, d’autre part par Philippe Collin, qui a avalé innocemment la couleuvre. Le Pen a bel et bien participé – et activement ! à la Bataille d’Alger», s’est-elle indignée, dont les dires sont rapportés par le journal Le Monde. En 2020, à l’occasion de l’anniversaire de l’indépendance du Congo, le roi Philippe de Belgique avait adressé une lettre au président de la République démocratique du Congo. Le roi des Belges avait écrit ceci dans sa longue lettre : «Je tiens à exprimer mes plus profonds regrets pour ces blessures du passé dont la douleur est aujourd’hui ravivée par les discriminations encore présentes dans nos sociétés.»

En 2019, le président allemand, Frank-Walter Steinmeier, a fini par demander pardon à la Pologne et aux victimes polonaises de l’agression allemande de la Seconde Guerre mondiale. En 2021, cette même Allemagne avait demandé pardon à la Namibie pour des massacres commis au début du XXe siècle sur les populations Herero et Nama. Voici des gestes alors salués par les médias des deux pays, la Pologne et l’Allemagne, et qui honorent leurs auteurs. Demander pardon pour des crimes abominables commis par l’Etat et au nom de l’Etat, ce n’est pas faire preuve de pleutrerie et de faiblesse, ce sont des actes accomplis par les grandes nations qui grandissent et ouvrent ainsi la voie de la réconciliation. Ce n’est pas le cas de la France qui, parce qu’elle a visiblement tout à gagner dans la question mémorielle, s’arroge le droit d’écrire l’histoire à travers un récit qui s’inscrit dans le prolongement de la pensée coloniale.

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