Un curieux mémorandum adressé au Président de la République Paul Biya écrit par certaines « élites » du « Grand Mbam » qui regroupe les Départements du Mbam et Inoubou et Mbam et Kim, signé par un certain Symphorien Mouzoko Yakana, porte-parole du « Mouvement Mbam/Région », jusque-là peu connu ou inconnu du public est récemment apparu dans l’espace public. Dans ce document, l’auteur ou les auteurs affirment notamment que les ressortissants du Mbam sont déçus du fait de leur marginalisation et même humiliation par l’actuel Chef de l’Etat pour qui ils votent pourtant massivement depuis son accession au pouvoir en 1982.
Le document fait également état des problèmes de développement, en l’occurrence le déficit en infrastructures dans le « Grand Mbam.» Dans ce mémorandum, il est également demandé au Président Biya, de nommer davantage de Mbamois aux postes de responsabilité au sein de l’Etat. Plusieurs autres conditions à remplir lui sont par ailleurs fixés, s’il veut encore bénéficier du soutien des ressortissants de cette partie du Cameroun lors de la prochaine élection présidentielle de 2025. En réaction à ce qu’ils appellent « prétendu » ou « pseudo » mémorandum, dans une mise au point écrite publiée le 30 juillet 2024, des élites, élus , chefs traditionnels et forces vives des départements du Mbam et Inoubou et Mbam et Kim »démentent et rejettent « avec force », les « allégations » contenues dans ce document Quoi qu’il soit, il convient cependant de relever que des ressortissants du Grand Mbam,ne sont pas les seuls à avoir adressé un mémorandum au Président de la République dans lequel ils exposent les problèmes de développement de leur localité.
On a en effet déjà eu dans le même rayon géographique, les mémorandums ou memoranda, du Département du Mfoundi, de l’ensemble de la région du Centre, et ailleurs on a connu les mémorandums du Grand-Nord, de la région de l’Adamaoua, ou encore de la région de l’Est.bGénéralement, ces formes de pétitions mettent en exergue le manque des infrastructures essentielles au développement de leurs localités, et réclament plus de représentations des leurs dans les hautes sphères de gestion de l’Etat. A la fin, on se demande bien souvent, si ce n’est pas ce dernier aspect mentionné, qui est la véritable source de motivation des rédacteurs des mémorandums, dont la plupart, en tout cas, tel qu’il est souvent présenté à l’opinion, préfèrent rester anonymes. Une telle situation trahit les ambitions égoïstes de certains qui cherchent à utiliser les difficultés du quotidien des populations, généralement en grand nombre de leur région, pour leur positionnement personnel dans un système politique fortement gangrené par le clientélisme.
Certains co-rédacteurs ou porte-paroles de mémorandum, ont par exemple ensuite été nommés à des postes ministériels, sans pouvoir pour autant apporter le développement souhaité à leur région, ou le bien être attendu à la plupart des membres de leur communauté d’origine ; cela aussi parce que, toute personne qui occupe une fonction publique dans un Etat, est d’abord au service de l’ensemble des populations du pays et non de sa seule région ou communauté d’origine. Bien que la gestion du pouvoir au Cameroun, soit dans les faits hautement centralisée, on se demande bien pourquoi, les auteurs des mémorandums n’interpellent pas généralement, leurs élus : conseillers municipaux et régionaux, maires, députés ou sénateurs sur la situation de leur localité, à défaut de leur faire porter à découvert et non en cachette, et donc d’assumer pleinement le contenu de leurs écrits avec toute la légitimité de représentants élus de la population dont ces derniers disposent ?
Par ailleurs, dans un contexte démocratique, pourquoi ne pas utiliser son bulletin de vote, pour sanctionner celui ou ceux qui, appelés à résoudre les problèmes de la contrée ne l’a, ou ne l’ont pas fait, ou plus largement, proposer un projet ou programme alternatif à l’occasion des élections ? Depuis 1992, des élections de diverses natures sont organisées au Cameroun dans un intervalle régulier compris entre cinq (05) et sept(07) ans. Au finish les mémorandums comme ceux du Grand Mbam au Cameroun, bien que regorgeant des éléments pertinents dans le fond, sont en réalité des outils de chantages politiques à des fins prébendiers, pour certaines élites politico-administratives, ou pour ceux qui aspirent à le devenir, tout cela au détriment du groupe au compte duquel, ils prétendent vouloir défendre les intérêts.
Armel Hitebe, Directeur de publication du Politics