Face à la fermeture généralisée des écoles due à la violence et aux enlèvements de masse, le gouvernement fédéral introduit des cours numériques pour le primaire et le secondaire. La mesure est saluée, mais la fracture numérique et les inégalités d’accès au net constituent des défis majeurs.
Abuja, Nigeria – La crise sécuritaire qui frappe le Nigeria, marquée par une recrudescence des violences armées et des enlèvements de masse, a forcé le gouvernement fédéral à prendre une décision radicale : basculer vers l’enseignement en ligne pour les élèves du primaire et du secondaire.
Cette initiative, qui fait suite à la fermeture de nombreuses écoles, principalement dans le nord-ouest et le centre-nord, est perçue comme une bouée de sauvetage pour la scolarité de milliers d’enfants.
La solution numérique saluée, mais conditionnelle
Yvonne Momah, consultante en éducation basée à Abuja, a qualifié la démarche du ministère de l’Éducation de « louable et admirable », y voyant une ouverture vers des solutions alternatives aux problèmes éducatifs.
Toutefois, elle a immédiatement pointé du doigt la principale faiblesse du plan : l’accès à Internet.
L’obstacle de la connectivité : « Je trouve louable et admirable que le ministère de l’Éducation prenne une telle mesure […] Cela ouvre véritablement la voie à des solutions alternatives aux problèmes éducatifs », a déclaré Momah. Elle a toutefois précisé que des outils numériques éducatifs existent déjà pour l’apprentissage hors ligne, permettant un accès aux ressources via des solutions mobiles, même sans connexion constante.
Si le gouvernement fédéral justifie officiellement ce changement par un déficit d’enseignants de plus de 1,2 million, il est difficile de dissocier cette mesure de l’état d’urgence sécuritaire déclaré par le président Bola Ahmed Tinubu.
Le fossé urbain-rural et l’inégalité d’accès
La réalité sur le terrain met en lumière les inégalités d’accès, en particulier entre les enfants des zones urbaines et ceux des zones rurales, où la connectivité est faible ou inexistante.
Des parents de l’État du Niger, comme Justina Olayemi, gardent cependant espoir : « L’éducation ne se limite pas aux quatre murs de la salle de classe. Elle se déroule partout : dans notre environnement, notre communauté, et même en ligne », a-t-elle souligné.
Pourtant, pour les élèves dont les écoles restent fermées et qui n’ont pas reçu de support numérique, le sentiment d’être à l’arrêt est fort. Hannah Friday, une élève concernée, déplore que le gouvernement n’ait rien fourni pour régler la situation : « Nous sommes restés à la maison, nous n’avons rien appris. Nous n’avons pas lu. Nous sommes simplement restés à la maison à ne rien faire. »
L’enjeu est critique : depuis 2014, plus de 1 400 élèves et enseignants ont été enlevés par des groupes armés. La transition vers le numérique est donc une course contre la montre pour garantir la continuité pédagogique sans compromettre la sécurité des enfants.