22 décembre 2024, 8:08 am

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La «Chinafrique», l’heure de la remise en cause ?

Le sommet biannuel de la Chine-Afrique a commencé hier à Dakar dans un format plus modeste que les précédents, il se tient au niveau ministériel. L’absence de Xi Jinping est-elle un signe d’essoufflement des relations économiques ?

C’est principalement à cause du Covid 19 que le dirigeant suprême de la République populaire de Chine est resté chez lui. C’est aussi à cause de la pandémie que de grands investissements chinois prévus en Afrique sont aujourd’hui en souffrance. La ligne de chemin de fer à grande vitesse entre Monbassa et l’Ouganda n’est plus financée, tout comme l’autoroute entre Douala et Yaoundé au Cameroun ou encore un grand projet de chemin de fer en Ethiopie. Les banques chinoises sont devenues prudentes voire réticentes à s’engager en Afrique et les investissements réalisés dans le cadre de la Route de la soie ont fondu, passant de 11 milliards de dollars en 2017 à 3,3 milliards en 2020. Ce n’est pourquoi personne ne s’attend aujourd’hui à Dakar des annonces tonitruantes d’investissement chinois se chiffrant en dizaines de milliards de dollars comme c’était le cas lors des éditions précédentes.

La Chine n’est plus le partenaire idéal du développement africain ?

Ce qui a été accompli en vingt ans demeure. Avec des échanges portant sur 200 milliards de dollars par an la Chine est incontestablement le premier partenaire commercial de l’Afrique, son premier créancier et ses entreprises de BTP sont omniprésentes, elles captent maintenant le tiers des grands chantiers d’infrastructures. D’après l’Afrobarometer publié au Ghana, la présence chinoise reste très appréciée par la rue africaine. Mais les dirigeants africains sont en train de sortir de leur fascination béate pour cette grande puissance à première vue très accommodante. D’abord parce qu’ils réalisent que l’argent facile des Chinois est en fait très cher, ils prêtent mais à leurs conditions, en venant avec leur propre personnel au bénéfice de leurs propres entreprises, et en obtenant des ristournes fiscales. Au final, l’addition est astronomique et très indigeste quand la crise survient. 

Pékin se pose volontiers en alternative au néo colonialisme, c’est justifié ?

Derrière ce récit officiel, ses motivations ne sont pas si éloignées de celles des partenaires historiques de l’Afrique, elle a d’abord été attirée par les richesses du sous-sol africain, pour satisfaire ses propres besoins, et sa présence économique très forte en Afrique n’a en rien modifié la donne économique du continent, il n’est pas sorti de la dépendance aux matières premières qui constitue 80% toujours de ses exportations. Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves le Drian, le dit sans ambages : la Chine agit « en prédateur ». La rudesse des propos tenus dans un entretien donné aux nos confrères du journal Le Monde a fait sursauter les Chinois. Leur franchise témoigne surtout de la rivalité croissante entre l’Occident et Pékin pour reconquérir la confiance des Africains et les parts de marchés qui vont avec. 

Le modèle des routes de la soie a fait école ? 

L’Europe est en train de peaufiner son Global Gateway avec l’Afrique, un partenariat présenté cet automne par la présidente de la Commission européenne. Les Etats-Unis déploient leur propre outil, Build Back Better -reconstruire en mieux- ; Anthony Blinken, le chef de la diplomatie américaine, a fait récemment une première tournée sur le continent dans la perspective d’un sommet Afrique-États-Unis en 2022. Les Occidentaux sont en train de se réveiller et de proposer à leur tour des partenariats plus séduisants aux Africains. Il est temps. Car la compétition s’est accrue sur ce grand marché africain en devenir. La Russie, la Turquie, le Brésil et dans une moindre mesure l’Inde sont aussi à l’offensive. 

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