Sans entrer dans le fond des tenants et aboutissants ayant conduit à la décision du gendarme bancaire de la Région, je dois dire, à mon humble avis, que cette décision suscite en nous, un certain nombre d’interrogations et de problématiques : Cette décision intervient alors que le processus de transfert de ces avoirs est déjà engagé et que certains organismes financiers, y compris la BEAC nationale, ont déjà signé des accords ou conventions de transferts des avoirs en leur possession.
Comment comprendre ce timing et quid des avoirs déjà effectivement transférés à la CDEC (va-t-elle les conserver ou les retourner aux établissements financiers qui ont exécuté les transferts ? Sur le plan épistémologique du droit et de la (bonne) pratique des affaires (particulièrement dans le domaine financier où les changements et innovations vont souvent plus vite que la réglementation), on peut s’interroger si l’absence de réglementation ou le vide juridique doit justifier le statu quo (interdiction de faire ou créer) ou profiter à l’avancée ou à l’innovation ? Autrement la loi ou la réglementation doit-elle précédée ou conditionner l’activité économique ou alors doit-elle suivre à posteriori la liberté économique ? Il y a 2 pensées ou écoles idéologiques qui s’opposent sur la question.
Le SG de la COBAC fait bien d’attirer l’attention des parties prenantes sur les risques que font peser ces transferts de valeurs sur la stabilité financière de la CEMAC s’ils ne sont pas bien encadrés. C’est un rappel qui me paraît extrêmement important et que tous les acteurs doivent avoir ou garder à l’esprit dans cette affaire. En même temps et relativement au point évoqué plus haut, il me souvient que ce fut l’un des arguments forts de nos banques au tout début de cette affaire pour tenter de freiner voire même empêcher le transfert desdits avoirs après la mise en place de la CDEC. Elles ont mm obtenu un moratoire d’exécution d’un an (si mes souvenirs sont exacts) à cet effet. On peut donc aussi se demander si dans cette affaire les banques ne sont-elles pas plus concernées par leur propre survie que par la nécessité de préserver la stabilité financière de la région.
Tout laisse penser en effet qu’il s’agit pour nos banques de sauvegarder ces avoirs dans leurs portefeuilles afin de continuer à « tourner » avec et de renforcer leur propre bilan. Ce n’est un secret pour personne que dans un environnement où les banques sont frileuses ou rechignent à jouer pleinement leur rôle traditionnel pour accompagner le financement de l’économie réelle, et de nos PMEs en particulier, ces avoirs constituent pour elles une véritable épargne longue, moins chère et gratuite, que dis-je une « manne », à laquelle elles s’accrochent comme des sangsues et fructifient depuis tant d’années à leur seul intérêt et profit. Elles ont bien compris que sans ces avoirs, beaucoup d’entre elles vont être obligées d’augmenter leur capital et/ou enfin faire le métier réel de banquier qui est attendu d’eux à leurs risques et périls. Enfin il serait intéressant de savoir ce qui s’est passé au Gabon et au Congo Brazza où des CDEC existent déjà.