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Edito : La reconstruction des nations Africaines

L’héritage de la colonisation est la politique du diviser pour mieux régner et le repli ethnique. Si « la démocratie est la dictature de la majorité sur la minorité », comment les minorités ethniques sont-elles arrivées à prendre le pouvoir et à le conserver dans un contexte où les clivages ethniques ou tribalistes comme en Lybie ont été créés et entretenus à des­sein par les colons puis repris après les indépendances par les clans prési­dentiels pour continuer à exercer le pouvoir et à faire main basse sur les ressources de leur pays ?

Les frontières issues de la colonisation n’ayant tenu aucun compte des limites des royaumes, leurs populations se sont retrouvées disloquées entre plusieurs pays, d’où la nécessité de travailler à la construction de nouvelles nations. Si, avec les indépendances, on a assisté à une réelle volonté de créer des nations, le constat de l’échec est probant puisque le vote ethnique, tribaliste surtout régionaliste est légion en Afrique, comme le montrent les exemples des dernières élections présidentielles et législatives au Kenya, au Togo, en Côte d’Ivoire, en Guinée, etc. Il est pratiquement impossible à un homme du sud de se faire élire au nord et vice-versa ; dans une région donnée, c’est le facteur ethnique qui prédomine. Les États africains ont-ils échoué dans la construction de leur nation ? Manifestement OUI.

On n’entend parler de nation que dans les discours politiques, la fibre patriotique et nationaliste n’est palpable que lors des victoires des équipes nationales de football pour ne citer que celles-là… La vie politique n’inspire plus confiance, surtout en prenant en compte le rôle prépondérant des armées à la solde des clans présidentiels, n’hésitant pas à retourner leurs armes contre leurs propres concitoyens et à renverser des présidents démocratiquement élus, au lieu d’être des armées impartiales et républicaines. Tous ces éléments expliquent bien le climat délétère qui règne sur les pays à l’approche des élections. Paradoxalement, l’adhésion des États africains aux instruments régionaux et internationaux allant dans le sens de la consolidation de la démocratie et de la sauvegarde des droits humains ne tarit pas, leur application constitue donc le véritable enjeu sinon le défi de la démocratisation des sociétés africaines.

L’Afrique a enregistré des avancées notables et des échecs qui s’inscrivent dans le cours normal du processus de démocratisation qui est plus ou moins long selon les spécificités des pays. Avec ses multiples accords, traités internationaux, continentaux et régionaux, l’Afrique a déjà un cadre assez séduisant et propice à l’émergence de véritables démocraties. Le remède existe déjà et il est connu de tous : il émanera de la volonté des au­torités politiques africaines de traduire dans les faits ces différents textes; nous en citerons quelques-uns en guise d’exemple. La Charte africaine de la démocratie et des élections, adoptée le 30 janvier 2007 à Addis-Abeba (Éthiopie), constitue la manifestation de la volonté des États africains d’ériger la démocratie en modèle de développement en s’engageant dans la promotion de la démocratie, du principe de l’État de droit et des droits de l’homme.

Le Protocole de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance (protocole additionnel aux protocoles sur la prévention des conflits armés) en son article 2 section 2 relative aux élections (chapitre 1) interdit la modification des constitutions six mois avant les élections. La Déclaration de Bamako du 3 novembre 2000, adoptée après le Sympo­sium international sur le bilan des pratiques de la démocratie, des droits et libertés dans l’espace francophone, a recensé les acquis, les insuffisances et échecs de la démocratie pour enfin proposer des solutions à l’ensemble des pays africains. Cet arsenal de textes traduit qu’un effort substantiel est fourni, en tout cas dans un cadre assez théorique, pour trouver un bon moule à la taille des aspirations pressantes et manifestées des peuples africains qui ont soif de démocratie. Les manifestations plus ou moins violentes des Tunisiens, Égyptiens et Libyens ont contribué à mettre la question de la démocratie à l’ordre du jour dans les pays d’Afrique noire en passant par la Chine et les grandes monarchies arabes.

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