Paradoxe dans l’Est de la République démocratique du Congo : alors que Washington exige le retrait immédiat des rebelles de l’AFC/M23 pour sauver les accords de paix, une partie des habitants d’Uvira est descendue dans la rue ce mardi. Leur message ? Le maintien du mouvement rebelle pour garantir leur sécurité.
Le centre-ville d’Uvira, verrou stratégique du Sud-Kivu, a été le théâtre d’une mobilisation inhabituelle. Plusieurs centaines de résidents ont marché vers l’hôtel de ville pour protester contre les injonctions de la diplomatie américaine, laquelle presse les militants de l’Alliance Fleuve Congo (AFC/M23) de quitter la zone.
« Ils sont venus nous libérer » : le cri de la rue
Pour de nombreux manifestants, la présence du M23 est perçue comme un soulagement face à l’insécurité qui rongeait la région. Dans la foule, les témoignages soulignent un ras-le-bol généralisé contre la criminalité urbaine :
« Chez moi, il y avait presque tous les jours des cambriolages, des coups de feu, et mes affaires ont été pillées avant leur arrivée. Qu’ils ne partent pas ! », confie un habitant à notre correspondant.
D’autres voient dans cette mobilisation une question de dignité nationale face à ce qu’ils qualifient d’« influence » excessive des États-Unis. « Nous sommes Congolais, et nous sommes un pays indépendant », martèle un manifestant, dénonçant le fait que des puissances étrangères décident du sort sécuritaire de la région.
Les « Accords de Washington » sous pression
Cette manifestation intervient dans un contexte diplomatique extrêmement tendu. Sous l’égide du président américain Donald Trump, la RDC et le Rwanda ont signé les Accords de Washington pour la paix et la prospérité. Ce pacte engage les deux pays à cesser tout soutien aux groupes armés.
Cependant, sur le terrain, la réalité contredit les chancelleries :
– Le M23 a continué sa progression vers Uvira, zone riche en minéraux.
– Le mouvement n’est pas signataire des accords de Washington.
Des milliers de civils, fuyant les combats, ont trouvé refuge au Burundi, pays allié de Kinshasa qui accuse Kigali de soutenir la rébellion.
Une diplomatie à deux vitesses : Le rôle du Qatar
Si les États-Unis mènent la pression publique, un autre canal de négociation semble s’ouvrir. Le M23, bien qu’exclu des discussions de Washington, participe à des pourparlers parallèles avec le gouvernement congolais, facilités cette fois par le Qatar.
Cette dualité diplomatique rend la situation illisible : pendant que Washington exige un retrait, Doha tente de médiatiser un accord direct, pendant que la rue, elle, impose son propre agenda sécuritaire.