Le Soudan reste déterminer à faire avancer le processus de transition, c’est la raison des différentes tractations qui ont pignon sur rue actuellement dans le pays. Tenter de rallier à l’accord-cadre signé en décembre les principaux absents à savoir, les signataires de l’accord de Juba d’abord, notamment Mini Minawi, leader du Mouvement de libération du Soudan et Gibril Ibrahim, chef du Mouvement pour la justice et l’égalité et ministre des Finances. Tel est le principal objectif des tractations en cours. Selon des observateurs avertis sans ses protagonistes suscités, le processus en cours reste voué à l’échec.
C’est l’histoire qui se répète pour la troisième fois depuis l’indépendance du pays. Mais cette fois, c’est une combinaison poignante de tragédie et de farce. Aujourd’hui le Soudan est malheureusement passé de la grâce d’être une rare histoire positive dans la Corne de l’Afrique à tomber aux mains des militaires. Une situation qui impose rapidement l’effectivité d’un gouvernement de transition qui est déjà sur les rails.
Le processus en cours doit déboucher sur un accord final et la nomination d’un Premier ministre et de son gouvernement civil. Mais le processus traine en longueur et de nombreux obstacles restent à franchir. Illustration, la transition démocratique du Soudan s’est interrompue en octobre 2021 et le renversement du gouvernement Hamdok par le coup d’Etat du général Abdel Fattah al-Burhan. En réponse à la condamnation internationale qui a suivi, les militaires ont proposé un accord de partage du pouvoir et réintégré Hamdok au poste de Premier ministre en novembre. Cet accord s’est toutefois avéré impopulaire auprès des groupes pro-démocratiques, ce qui a conduit Hamdok à démissionner le 2 janvier.
Le ralliement des principaux absents de cet accord rendrait en effet l’accord plus inclusif mais soulèverait aussi de nouvelles difficultés. Mini Minawi, leader du Mouvement de libération du Soudan et Gibril Ibrahim, chef du Mouvement pour la justice et l’égalité et ministre des Finances ont soutenu le coup d’État de 2021. D’où la question de savoir quel pourrait donc être leur rôle dans la désignation du Premier ministre et du futur gouvernement censé au contraire tourner la page du gouvernement militaire?
Cependant les comités de résistances, chevilles ouvrières de la révolution, mais également absent de la liste des signataires en décembre, refusent toujours toute discussion avec les militaires même si certains continuent de plaider pour leur ralliement. Il faut rappeler que l’accord-cadre a également laissé en suspens les cinq questions les plus difficiles à régler et qui conditionnent le succès ou non de la transition: la révision des accords de Juba, le démantèlement de l’ancien régime, la situation dans l’est du Soudan, la justice transitionnelle et la réforme du secteur de la sécurité. Ces sujets doivent être débattus au cours d’une série d’ateliers avant la signature d’un accord final.
Le 26 janvier, les clivages au sein de la société soudanaise ont semblé se creuser davantage lorsque des milliers de manifestants pro-militaires se sont rassemblés devant le bureau de Khartoum de la Mission intégrée d’assistance à la transition des Nations unies au Soudan (UNITAMS), exigeant la fin de «l’ingérence étrangère» et le «retour au pays» du représentant spécial des Nations unies pour le Soudan, Volker Perthes. Perthes, qui a été nommé à la tête de l’UNITAMS en janvier 2021, a tenté d’amener les parties prenantes soudanaises à la table des négociations pour discuter d’une solution politique pacifique et relancer la transition démocratique.
Selon lui, l’ONU elle-même «ne présentait aucun projet, aucune ébauche ou vision en vue d’une solution.» Mais le gouvernement soudanais dirigé par l’armée a rejeté ses efforts, affirmant qu’il devait travailler en tant que «facilitateur et non médiateur.»