Réduit au mutisme forcé depuis plus d’une cinquantaine d’années. Et si l’heure du réveil avait enfin sonné pour le peuple Gabonais? Après l’annulation du triple scrutin, la mise sur pied du Comité de Transition pour la restauration des institutions(CTRI) le peuple a tout de suite exprimé son camp. Une position qui tire ses origines sur une succession de provocations jusque-là tolérées par le peuple.
Dans les rues de Libreville le 30 Août matin, une foule en liesse scandant en chœur la chute du Parti Démocratique Gabonais au pouvoir depuis plus de cinquante ans. Tout à côté, les effigies du président Ali BONGO enlevés et d’autres déchirées par des jeunes visiblement enragés.
Au centre-ville, un déploiement spécial des hommes en tenue fait le tour afin de rassurer les populations. Lesquelles saluent à l’unanimité ce qui convient d’être appelé coup de révolution. Seulement, peut-on parler de surprise pour ce pays d’Afrique Centrale de 2,3 millions d’habitants ? On est tenté de répondre par la négative en convoquant certains éléments historiques et factuels.
D’abord sur le mépris et la condescendance affichés à l’endroit de ce peuple, durant des lustres. D’abord par le père BONGO qui a régné pendant plus de 40 ans sous la couverture des amis occidentaux avec qui, il fait passer des dyles pour garantir leurs intérêts et ceux de sa famille biologique. Entre-temps, le petit peuple est aux oubliettes et doit se contenter des miettes pourtant le pays regorge de potentialités immenses.
Suite au décès du père en 2009, c’est au tour du fils Ali de prendre naturellement le pouvoir et ce après un consensus mal digéré avec sa sœur Pascaline ancienne ministre des relations extérieures qui exige elle aussi d’avoir droit au chapitre. Dans la foulée, deux élections sont organisées et à chaque fois fortement contestées par l’opposition et jusque-là le peuple se fait discret.
Mais le grand tournant c’est cette date fatidique du 24 Octobre 2018. Où, lors d’une rencontre avec les chefs d’Etats à Riyad en Arabie Saoudite, Ali BONGO est victime d’un AVC. Ensuite suivra une longue période d’absence de 14 mois passés au Maroc pour sa convalescence. Alors que beaucoup convoquent déjà l’hypothèse d’une vacance à la tête du pays, l’homme fait son grand Retour en présidant même une rencontre entre les Chefs d’État de la CEEAC. Visiblement diminué, il se déplace désormais à l’aide d’une Canne mais garde le sourire un peu comme pour narguer ses détracteurs.
Seulement pour plus d’un, c’est une mise en scène car Ali semble physiquement amoindri et donc ne peut plus contrôler grand-chose. Une fragilité sanitaire à l’origine d’au moins deux tentatives de coups d’État dont l’une en son absence et l’autre dès son retour de convalescence. Bien que soldé à chaque fois par des échecs, quelques signes de porosité se font déjà ressentir dans l’appareil Gouvernant. Malaise à priori banalisé par le fils de l’autre qui contre toute attente décide de briguer un troisième mandat. Élections déroulées dans le flou et l’omerta absolue. Frontières fermées, rupture de connexion internet, média et observateurs persona non grata.
Et c’était peut-être là, l’erreur à ne pas commettre. Coupé du monde pendant quelques jours par une volonté d’infantilisation orchestrée par le pouvoir, ce retrait forcé aura finalement aidé le peuple souverain à se maturer. Une prise de conscience admirable dont la célérité est juste révélateur de l’excès de patience d’un peuple pourtant conscient des enjeux et désireux d’écrire sa propre histoire à l’image des frères Ouest Africains. Cependant, vigilance vigilance vigilance car les voleurs de victoires ne tarderont pas à se manifester. Bravo au peuple souverain.
